Tout récemment, j’ai présenté plusieurs chroniques à la télévision (dont celle ci-dessus en vidéo) sur les atouts des tisanes à base de plantes.
En faisant mes recherches pour ces chroniques, à la fois dans mon expérience passée, dans ma bibliothèque géante et sur le web, j’ai constaté qu’il n’était vraiment pas facile de s’y retrouver en tant que néophyte quant il s’agit d’utiliser des plantes sèches ou fraîches pour la santé.
Moi qui adore les plantes médicinales et les huiles essentielles, je trouve parfois dommage que si peu de gens connaissent la phytothérapie, et que la tradition de “bonne fâme” de l’herboriste semble parfois en passe de disparaître pour de bon, surtout en France.
J’ai donc décidé d’interviewer Louis Gobron, un de mes herboristes favoris, pour parler de tout cela.
Dans cet article, Louis nous livre des infos utiles sur le métier d’herboriste aujourd’hui, et nous donne gratuitement accès à son super outil web pour découvrir les plantes qui nous font du bien en fonction de nos cas particuliers. Il nous donne aussi une astuce beauté au naturel !
Un chic type ce Louis, c’est moi qui vous le dit 😉 ! Lisez plutôt…
Louis Gobron est français mais il a étudié l’herboristerie à la fois en France et en Belgique où le diplôme existe encore. Il a ouvert ensuite sa propre herboristerie à Bouillon (clic) !
Louis est un crac. Sur son site internet, il a développé “Votre plante en un clic” un outil web de recherche de plantes en fonction des affections à traiter. Cet outil est formidable à deux titres : il est simple à utiliser, il est gratuit, et en outre il constitue une des seules initiatives du genre sur internet qui soit sans lien direct avec une gamme commerciale ou un produit.
Lisez son interview pour en savoir plus :
1) Louis, vous êtes français mais vous êtes “herboriste” installé et diplômé en Belgique. Le métier est-il une spécialité exclusivement belge aujourd’hui ?
En France, le diplôme d’herboriste n’existe plus : il a été supprimé sous le régime de Vichy par Philippe Pétain le 11 septembre 1941. Seuls les pharmaciens peuvent dorénavant vendre des plantes en présentant leurs propriétés médicinales. On trouve donc encore quelques herboristeries, principalement dans les grandes villes françaises (Paris, Lyon, Strasbourg, Marseille), où des pharmaciens ont décidé de se consacrer uniquement à l’herboristerie.
J’avais ainsi deux possibilités pour exercer ma passion : soit devenir pharmacien en France, soit m’expatrier en Belgique et devenir herboriste. La formation initiale de pharmacien en France n’étant pas du tout centrée sur la phytothérapie (la molécule chimique reste au centre des préoccupations), le choix a été vite fait ! Le comble est que des étudiants français en pharmacie de la faculté de Reims viennent régulièrement me demander de leur préparer des échantillons car ils ont une épreuve de reconnaissance de plantes séchées. C’est toujours avec beaucoup de plaisir que je leur présente mon herboristerie et ces échanges aboutissent très souvent à la même conclusion : pharmaciens et herboristes sont complémentaires !
Notez que le métier d’herboriste existe en Belgique mais également dans de nombreux autres pays : Allemagne, Italie, Suisse ou Angleterre par exemple. Il n’est donc pas une spécialité exclusivement belge ; considérons plutôt que c’est la France qui a l’exclusivité de sa non-reconnaissance…
2) Pensez-vous qu’il y ait des incohérences entre le système qui régit le marché des plantes médicinales en France et celui pratiqué en Belgique ?
Mes plantes proviennent majoritairement de producteurs belges et français mais certaines ne poussent pas sous nos latitudes et sont donc importées du monde entier.
Le problème en France est que l’on autorise la production de plantes médicinales mais que la vente conseillée par des professionnels qualifiés reste excessivement encadrée et uniquement autorisée aux pharmaciens. La situation prête à sourire (ou pas) lorsque j’importe en Belgique des plantes médicinales provenant de producteurs français pour les proposer via mon site internet… à des clients français.
La Belgique a l’intelligence d’autoriser et d’encourager la production, le conseil et la vente des plantes médicinales tout en proposant une formation très spécifique qui permet d’exercer correctement et en toute sécurité le métier d’herboriste.
3) Installé depuis un an à Bouillon, quels sont vos plus beaux succès en herboristerie ?
Beaucoup de plantes très communes me sont demandées quotidiennement : la passiflore (Passiflora incarnata), le fenouil (Foeniculum vulgare), la verveine (Verbena officinalis), le bâton de réglisse (Glycyrrhiza glabra) ou encore la camomille romaine (Chamaemelum nobile).
Deux autres plantes ont énormément de succès quant aux bienfaits qu’elles apportent :
-le tégument de psyllium blond (Plantago ovata).
C’est une cousine de nos plantains (Plantago major, Plantago media, Plantago lanceolata) mais originaire d’Inde. Elle permet, entre autres, de réguler le transit intestinal en cas de constipation (laxatif de lest sans irritation de la muqueuse) mais également en cas de selles liquides où ses mucilages vont absorber l’excès d’eau.
-la racine secondaire d’harpagophytum (Harpagophytum procumbens).
Très utilisée pour ses propriétés anti-inflammatoires, on me la demande sous toutes ses formes : racine séchée, teinture-mère, gélules, sirop, gel, ampoules… De plus en plus de personnes se tournent également avec succès vers cette plante pour soulager l’arthrose de leurs animaux, les chevaux notamment.
Les thés sont également très appréciés : thé au cacao, aux agrumes, au pain d’épices, noir, blanc, vert, etc. C’est ici le plaisir du palais qui l’emporte sur les propriétés thérapeutiques de Camellia sinensis qui sont pourtant bien réelles !
4) Avez-vous deux astuces Slow Cosmétique à base de plantes pour le soin de la peau ?
La beauté de la peau passe avant tout par la santé du foie ! Une tisane composée à parts égales de semences de chardon-Marie (Silybum marianum), de feuilles de romarin (Rosmarinus officinalis), de racines de pissenlit (Taraxacum officinalis) et de partie aérienne d’artichaut (Cynara scolymus) permettra de drainer cet organe vital pour obtenir un beau teint. Ajoutons-y la racine de bardane (Arctium lappa) et la partie aérienne de pensée sauvage (Viola tricolor), toutes deux dépuratives, et nous obtenons ma première astuce pour le soin de la peau. Cette tisane s’utilisera en infusion de 10 minutes à raison d’une cuillère à café par tasse, après chaque repas, et durant 3 semaines.
Ma deuxième astuce vous permettra d’utiliser une plante que je trouve particulièrement ravissante : la mauve (Malva sylvestris). Grâce à ses propriétés adoucissantes et calmantes, elle est toute indiquée pour les peaux fragiles et irritées.
Voici ma recette du masque à la mauve, pour les peaux sensibles et irritées :
– laissez infuser dans une tasse d’eau chaude 4 grammes de fleurs de mauve ;
– versez 2 cuillères à soupe de l’infusion dans un bol contenant 2 cuillères à soupe de fromage blanc ;
– appliquez ce masque sur votre visage nettoyé à l’eau florale de camomille romaine (Chamaemelum nobile) ;
– laissez agir et détendez-vous durant 15 minutes en lisant le dernier ouvrage de Julien Kaibeck. Cette étape n’est pas obligatoire mais vivement conseillée ;-).
– rincez votre visage à l’eau de source.
5) Quel est votre souhait pour l’herboristerie dans les années qui viennent ?
Pour l’herboristerie au sens général du terme, je souhaite avant tout qu’elle se démocratise, que l’on réutilise les propriétés des plantes oubliées et que l’on découvre de nouveaux principes actifs en étudiant la flore mondiale. Des chercheurs de l’institut des neurosciences de Grenoble et de l’Université de Yaoundé viennent par exemple de découvrir à l’état naturel (chez Nauclea latifolia) une molécule antidouleur que l’Homme utilise depuis les années 70 sous sa forme… synthétique. La Nature avait quelques millions d’années d’avance sur nous, cela devrait nous inciter à étudier plus intensément les plantes, non ?
Concernant mon herboristerie, je souhaite avant tout continuer à faire découvrir la phytothérapie et ses bienfaits au plus grand nombre. Cela passe évidemment par l’ajout de nouvelles plantes mais aussi d’huiles essentielles, de teintures-mères, de baumes, de bourgeons, de thés, de miels, de produits bruts pour créer ses « slow cosmétiques »… La liste est longue et les 50 m² actuels risquent de vite devenir insuffisants ! Le développement du site internet est également une priorité afin que chacun puisse retrouver chez soi les plantes de l’herboristerie. J’aimerais également consacrer du temps à l’étude de la médecine traditionnelle chinoise qui, il me semble, a beaucoup à apporter au reste du monde.
Merci à Louis pour ses bons mots, et espérons que l’herboristerie a encore de beaux jours devant elle malgré la frilosité des autorités politiques et de santé !
Et vous ? Que pensez-vous de l’herboristerie ? Et les tisanes aux plantes ? Lesquelles sont vos favorites ?