Dans cet article, je vous explique en quoi certaines huiles essentielles sont réputées “hormon-like” et peuvent être considérées comme des perturbateurs endocriniens, mais pas tout à fait comme les ingrédients cosmétiques polémiques dont on parle beaucoup en ce moment…
Qu’est-ce qu’un perturbateur endocrinien ?
La définition la plus acceptée est celle de l’OMS, reprise depuis 2017 par l’Union Européenne plus ou moins dans les mêmes termes. On considère un perturbateur endocrinien toute “substance chimique étrangère à l’organisme, d’origine naturelle ou artificielle, qui peut interférer avec le système endocrinien d’un organisme et ainsi induire des effets néfastes sur cet organisme ou sur sa descendance”.
On pense tout de suite aux molécules chimiques qu’on inhale sans s’en rendre compte (les émanations de colles, de plastiques, de peintures, les retardateurs de flammes, mais aussi les phtalates dans les parfums, et plus généralement pas mal de COV dans l’air des maisons). On pense ensuite aux molécules contenues dans de nombreux médicaments, parfois justement pour leur action sur le système endocrinien (les hormones de substitution par exemple). On pense évidemment aux plastiques qui contiennent le bisphénol A ou d’autres. Enfin, on pense aux ingrédients cosmétiques suspectés d’être des perturbateurs endocriniens lorsqu’ils sont appliqués sur la peau à répétition, ou de façon croisée avec d’autres (phenoxyethanol, dimethicone, triclosan, BHA/BHT, certains parabens, etc…).
On pense beaucoup moins aux huiles essentielles ou aux extraits de plantes, et pourtant pas mal d’entre eux ont une potentielle action de perturbateur endocrinien. J’en reste cependant un grand défenseur et je vous explique plus loin pourquoi…
Pourquoi avoir peur des perturbateurs endocriniens ?
En vérité, il y a encore peu d’études sur le sujet. Car il est difficile de mesurer l’action discrète des substances en cause sur le long terme, et sur de grands échantillons de population humaine.
Ce qui est certain, c’est que les perturbateurs endocriniens au sens large sont fortement suspectés d’avoir un effet sur la santé humaine à plusieurs niveaux :
- ils auraient une influence sur la fertilité, et en particulier sur la qualité des spermatozoïdes
- ils auraient une influence sur le développement de certains cancers. Attention, ils n’est pas prouvé qu’ils “provoquent” tous le cancer, mais leur influence une fois que le cancer est là est certaine.
- ils auraient une influence sur la maturité sexuelle (les règles chez les filles, la descente des testicules chez les garçons, etc.)
- ils auraient une influence sur le développement du foetus (et plus tard, sur le QI de l’enfant, sur son équilibre nerveux, etc).
Quelles huiles essentielles sont concernées ?
A vrai dire, toutes les huiles essentielles ou presque seraient susceptibles d’être assimilées à des perturbateurs endocriniens, car elles sont toutes composées à 100% de molécules aromatiques en tout genre, qui sont assimilables tantôt à des “hormones végétales”, tantôt à des “stimulants” hormonaux, etc.
Oui mais voilà, il s’agit là de molécules naturelles et non synthétiques, et qui plus est présentes dans chaque huile essentielle accompagnées d’autres molécules, ce qui les rend incomparables stricto sensu avec les molécules de synthèse présentes dans certains plastiques, colles ou cosmétiques.
Je partage d’emblée avec vous le témoignage d’Isabelle, une fidèle lectrice, qui nous explique la différence entre molécule naturelle et synthétique.
“A l’heure actuelle, la science considère qu’une molécule de synthèse est identique à une molécule naturelle. Il existe très peu d’études qui ont cherché à savoir si l’absorption des deux formes pouvait avoir des conséquences différentes. Dans la plupart des études, la source (synthétique ou naturelle) n’est même pas précisée. Mais il existe quelques études comparatives entre les sources naturelles ou synthétiques (pour les vitamines, par exemple), et elles confirment ce que certains thérapeutes sentent de façon intuitive (ce sont presque toujours des thérapeutes énergéticiens) : les molécules de synthèses posent problème là où les molécules naturelles n’en posent pas !
Très souvent les études sur les vitamines ont des résultats contradictoires inexplicables. Mais si on intègre cette donnée (molécule naturelle ou synthétique) alors les différences de résultat prennent sens. L’être humain est une partie d’un tout, la Nature. Les molécules de synthèse ne font pas partie de ce tout. Notre corps n’est pas programmé pour reconnaître ces molécules. N’est-ce pas logique que ces molécules synthétiques nous perturbent ?”
J’ajoute qu’en effet, certaines études font réfléchir : ainsi par exemple il a été prouvé que le linalol , molécule aromatique bien connue, cause des allergies lorsqu’il est testé en tant que molécule isolée (donc synthétique ou très travaillée par l’homme), alors que le même test avec l’huile essentielle de lavande vraie qui en contient beaucoup ne cause pas du tout les mêmes réactions allergiques, et beaucoup moins.
Pas de panique, l’usage des huiles essentielles à faible dose, dans un cosmétique par exemple (1% ), ne donne ni le cancer, ni n’a d’influence sur la fertilité. D’ailleurs, pour être honnête, votre peinture murale ne vous donne pas le cancer pour autant que vous l’utilisiez correctement. Tout comme l’air que vous respirez à la maison, pourtant chargé, ne vous abîme pas forcément la santé. Car tout cela est multifactoriel et s’exprime sur la durée à la fois… Donc chaque cas est un peu unique à vrai dire….
Si vous êtes enceinte ou allaitante, il faut cependant être plus prudent. Il en va de même si vous souffrez d’une maladie déjà présente à dimension hormono-dépendante (cancer …).
Dans ces cas précis, non seulement je recommanderais d’éviter les phtalates, les COV, les émanations de vernis, etc… mais il faut bien recommander aussi d’éviter certaines huiles essentielles, en particulier les huiles essentielles à sesquiterpènes et/ou alcools sesquiterpéniques.
Il n’y a aucune étude là-dessus, mais tout ce qu’on sait, c’est que ces molécules (comme le sclareol, le patchoulol…) imitent vraiment des hormones car leur structure chimique leur ressemblent. Ce qui théoriquement peut stimuler les récepteurs endocriniens, et donc jouer un rôle de perturbation.
ll n’existe pas de “liste officielle” des huiles essentielles concernées, mais je souhaite vous donner ici une liste non exhaustive, à des fins d’aide si vous êtes pharmacien ou naturopathe, ou tout simplement utilisatrice d’HE.
Je me suis centré sur les essences les plus courantes en aromathérapie, qui contiennent tantôt une part importante de sesquiterpènes, tantôt d’alcool sesquiterpénique. C’est un exercice qui n’est pas scientifique, mais qui vous aidera si vous devez éviter tous les perturbateurs endocriniens (si vous êtes enceinte, ou atteint(e) d’un cancer hormono-dépendant par exemple). Voici ma liste des huiles essentielles les plus assimilables à des perturbateurs endocriniens :
- Achillées (plusieurs sous espèces)
- Santal des Indes (Amyris balsamifera)
- Céleri
- Ylang-ylang totum (mais à des doses cosmétiques, je pense vraiment qu’il n’y a pas d’action endocrinienne).
- Cèdre (tous)
- Camphrier (Cinnamomum camphora, mais pas le Ravintsara)
- Myrrhe (Commiphora molmol)
- Cyprès (tous)
- Lemongrass
- Palmarosa (mais dans une mesure vraiment limitée)
- Carotte sauvage ou cultivée (Daucus carota) (mais dans une mesure limitée car la molécule concernée est ici assez unique)
- Eucalyptus globuleux (Eucalyptus globulus)
- Hysope (Hyssopus officinalis)
- Genévrier
- Ledon du Groenland
- Verveine citronnée
- Matricaire ou camomille allemande (matricaria recutita)
- Niaouli (melaleuca viridiflora)
- Cajeput (melaleuca cajuputii)
- Mélisse
- Nard Jatamansi
- Patchouli
- Tous les pins et les sapins mais par principe de précaution car très faible action théorique
- Sauge sclarée
- Santal blanc
- Tanaisie annuelle (Tanacetum annuum)
- Vetiver
- Gingembre officinal
Ces huiles essentielles ne sont PAS à éviter à tout prix. Si vous êtes dans un état normal, elle ne vous donneront ni cancer ni n’altéreront votre santé bien au contraire.
Mais pour un usage thérapeutique, elles seront à éviter si vous êtes enceinte, allaitante ou souffrant(e) d’une maladie hormono-dépendante de type cancer.
Enceinte et fan d’aromathérapie ?
Si vous êtes enceinte ou allaitante, il faudra éviter durant toute la grossesse les huiles essentielles listées ci-dessus hors usage ponctuel et cosmétique.
Il faudra en outre éviter aussi les huiles essentielles réputées “abortives” et/ou neurotoxiques : menthes, sauges, giroflier, aneth, romarin camphré et toutes les HE camphrées.
A partir du 4ième mois, vous pourrez utiliser des huiles essentielles à des dosages cosmétiques en toute quiétude si vous optez pour des dosages très faibles (autour de 1%) et n’utilisez que des huiles essentielles bien tolérées : lavande vraie, petitgrain bigarade, tea-tree, laurier noble, camomille noble, etc… Relisez mon article sur la grossesse et les huiles essentielles SVP.
Lisez mon livre “Slow Cosmétique pour toute la famille” qui traite de la beauté au naturel pendant la grossesse, l’allaitement, et pour les bébés. Ce livre est plus chouette à lire que cet article, croyez-moi, il est destiné à un public large ! Achetez aussi vos huiles essentielles auprès de producteurs de qualité comme ceux du réseau Slow Cosmétique.